L'hôtel à insectes (fin)
QUELQUES HÔTES INDÉSIRABLES
Les gîtes à insectes attirent inévitablement certains hôtes indésirables, qu’ils soient prédateurs, cleptoparasites (= voleurs de nourriture) ou parasitoïdes, responsables de la destruction d’un nombre plus ou moins important de larves d’abeilles solitaires.
Un Diptère, Cacoxenus indagator
L’un des plus fréquents est une minuscule mouche de la famille des Drosophiles, Cacoxenus indagator. Ce Diptère de 3 à 4 mm est un cleptoparasite de diverses Osmies, O. cornue, O. rousse et O. bleutée notamment. La femelle Cacoxenus guette les allées et venues d’une Osmie affairée à la construction de son nid et profite d’un moment d’absence de celle-ci pour aller pondre dans la cellule en cours d’approvisionnement. L’Osmie ne s’aperçoit pas de la ruse et ferme la cellule après avoir pondu elle aussi.
Les œufs du Cacoxenus éclosent et les larves se développent très rapidement en se nourrissant de la pâtée pollinique destinée à la larve de l’Osmie. Celle-ci, privée de nourriture, meurt affamée quand elle n’est pas détruite par les larves de Cacoxenus parfois nombreuses. Les larves du Diptère se regroupent dans le vestibule du nid et, avant leur nymphose, perforent le bouchon à l’aide de leurs crochets afin de permettre la sortie ultérieure des adultes.
Des Coléoptères, les Clairons
Le Clairon des abeilles (Trichodes apiarius), le Clairon des ruches (Trichodes alvearius) et le Clairon à épaulettes (Trichodes leucopsideus) sont des jolis Coléoptères de la famille des Cleridae qu’il n’est pas rare de rencontrer en été sur les inflorescences de divers végétaux. Ils sont en effet floricoles et contribuent à la pollinisation croisée grâce à leur pilosité fournie qui retient les grains de pollen des fleurs visitées. Mais ici s’arrête leur côté sympathique car ce sont aussi des carnassiers qui n’hésitent pas à mettre à leur menu les autres insectes rencontrés sur les ombelles.
Les femelles ont la particularité de pondre à proximité des nids d’abeilles solitaires, notamment ceux des Osmies et des Mégachiles. Les jeunes larves très plates, aux mandibules puissantes, profitent de la moindre anfractuosité pour se glisser dans les nids des abeilles. Une fois à l’intérieur, elles dévorent larves et nymphes. Chaque larve de Clairon consomme en moyenne de 4 à 10 larves d’abeilles. La fécondité des femelles étant d’environ 200 œufs, les Clairons sont parfois à l’origine de pertes importantes dans les élevages d’Osmies et de Mégachiles.
Des Hyménoptères
- Guêpes Sapygidae
Parmi les Hyménoptères rôdant autour des nids installés dans les hôtels figure Sapyga quinquepunctata, une guêpe de la famille des Sapygidae (petite famille représentée par seulement 6 espèces en France). La femelle de cette guêpe d’environ 10 mm se reconnaît à son abdomen rouge et noir à taches blanches et à son front présentant une tache médiane blanche en forme de V renversé.
Cette espèce vole en une seule génération, dès le mois d’avril dans le sud de la France. Elle pond dans les cellules préalablement approvisionnées en pollen des nids d’Osmies. La larve de 1er stade possède de fortes mandibules avec lesquelles elle mange l’œuf de l’abeille. Les larves des stades suivants ont de plus petites mandibules et se nourrissent de la pâtée pollinique destinée initialement à la larve de l’abeille.
- Guêpes Ichneumonidae et Gasteruptiidae
D’autres guêpes sont aussi attirées par les occupants des nids installés dans les hôtels à insectes. Les photos ci-dessous présentent des femelles à l’ovipositeur démesuré.
Stenarella domator appartient à la famille des Ichneumonidae. La femelle se reconnaît à son corps noir, à l’anneau blanc présent sur chaque antenne et à ses pattes arrière aux tarses blancs. Elle vole de mai à septembre et parasite les nids d’Hyménoptères qui utilisent la terre ou la boue comme matériau de construction. Les nids des Ancistrocerus et des Symmorphus sont particulièrement ciblés.
Les espèces du genre Gasteruption appartiennent à la famille des Gasteruptiidae. Ces guêpes parasitent les nids de diverses abeilles solitaires dont ceux des Osmies et des Hylées. Leur long ovipositeur très résistant leur permet de forer dans les tiges abritant les nids et de pondre dans les cellules larvaires. Il n’est pas possible d’identifier les espèces sur photo, différents critères nécessitant le passage des insectes sous une loupe binoculaire
- Guêpes Chalcididae
Divers Chalcidiens fréquentent les hôtels à insectes, profitant des nids construits par les abeilles. Le Leucospis dorsigera parasite les nids de divers Megachilidae, principalement Osmies et Anthidies mais aussi Hériades. Il est présenté dans les Hériades résinières de même que le petit Eurytomidae, peut-être un Aximopsis, en photo ci-dessous.
Plusieurs espèces de Monodontomerus (famille des Torymidae) parasitent le genre Osmie. Chez M. obscurus, la femelle (4 à 5 mm) perfore le nid avec son ovipositeur et injecte dans la larve de l’abeille une substance paralysante. Les œufs sont pondus contre la larve. Celle-ci servira de garde-manger à la progéniture de la guêpe. Une seule larve d’Osmie cornue peut assurer le développement de dix de ces guêpes.
- Guêpes Chrysididae
Les guêpes dorées sont des guêpes solitaires très colorées aux magnifiques reflets métalliques. Les femelles pondent leurs œufs dans les nids d’abeilles ou de guêpes solitaires, profitant d’un moment d’absence des fondatrices. Les larves de la guêpe, carnassières, se nourrissent des larves de l’hôte. Ces jolies guêpes ne craignent ni les mandibules ni le dard des abeilles et des autres guêpes. Elles se roulent en boule à la façon des cloportes lorsqu’elles sont inquiétées (la face ventrale de leur abdomen est concave), leur solide tégument faisant office de cuirassse. Leur détermination sur photo est souvent délicate. Chrysis comparata s’attaque aux nids des Hylées et des Anthidies cotonnières (A. manicatum). Chrysis mediata parasite principalement des guêpes appartenant aux genres Odynerus et Ancistrocerus.
Des acariens
CONCLUSION
Ces trois articles donnent un aperçu de quelques espèces fréquemment rencontrées dans les hôtels à insectes. La liste n’est pas exhaustive et elle sera complétée au fur et à mesure des nouvelles rencontres. Il est utile de préciser que pour qu’un hôtel à abeilles soit accueillant, encore faut-il que la table soit bonne. Les différents occupants doivent en effet pouvoir trouver des plantes sauvages fleuries à proximité pour assurer leur alimentation et l’approvisionnenment des nids. Rappelons que contrairement aux abeilles mellifères, les abeilles solitaires ne s’éloignent guère de leur site de nidification pour le butinage.
Un grand merci à Gérard Le Goff pour son expertise, la fourniture de documents et sa relecture avisée. Merci aussi à Matthieu Aubert et Jérome Carminati pour leurs expertises et le partage de documents. Merci à Jean-Marc Cheyrias et à l’équipe de l’Abeille rousse ainsi qu’à Jean-Pierre Moussus, Martine et Charlotte Grillet, Philippe Rivière pour leurs contributions iconographiques.
Sources :
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- Bellmann H. (2019) Abeilles, bourdons, guêpes et fourmis d’Europe - Editions Delachaux et Niestlé 334 pp.
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- Wildbienen
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